Le texte ci-dessous est extrait de mes observations dans les secrétariats d’un CHU français. À partir de mes carnets de notes, j’ai rédigé un « catalogue de situations » qui sera en partie utilisé pour rédiger ma thèse de doctorat. Les situations publiées sur ce blog décrivent des objets et des gestes que j’ai pu observer et me semblent particulièrement pertinent pour décrire le travail médico-administratif des secrétaires médicales. Les prénoms suivis d’une astérisque ont été modifiés.*

Lorsque je rencontre Manon*, elle est déjà installée à son bureau, dans une pièce étroite qu’elle partage avec une autre secrétaire. Située au 2e sous-sol du bâtiment, je suis étonnée de trouver tout de même une petite fenêtre donnant sur l’extérieur : un puit de lumière entouré des branches d’une plante grimpante éclaire subtilement l’arrangement de 3 bureaux imbriqués autour d’un axe central. L’un d’eux n’est pas occupé de manière permanente et octroie une respiration dans cet espace confiné ou chaque centimètre fait l’objet de négociations : est-il préférable d’avoir l’imprimante à portée de main ou bien d’avoir un passage plus large pour aller et venir entre le bureau et la porte ?
Dans le dos de Manon*, de grandes étagères montées sur crémaillère regroupent des boîte d’archive transparentes proprement étiquetées, et contenant des pochettes colorées. À sa droite, une armoire est également remplie de boîtes transparentes, vides le jour de ma présence. L’impression d’un ordre savamment organisé m’est confirmé par Manon*, qui m’explique volontiers le système de rangement qu’elle a mis en place.
Il était important de maintenir un lien clair entre les dossiers numérisés sur un intranet et les dossiers papier stockés dans le secrétariat et des armoires de stockage. La toxicologie étant un service de biologie dont une partie importante de l’activité se fait en lien avec le service de médecine légale, les outils numériques de travail sont bien différents de la plupart des services hospitaliers : le dossier patient informatisé n’est presque pas utilisé, au profit d’un logiciel dédié aux laboratoires et un espace de travail en ligne.
Sur les étagères de Manon*, les pochettes colorées sont répartie selon un code déterminé : en bleu les personnes décédées, en violets les personnes vivantes, en jaune les cas de soumission chimique, en rouge les contrôles routiers et en rose les mort inattendue du nourrisson (MIN) et les autopsie scientifiques.
Ces dossiers colorés sont rangés dans des boîtes transparentes étiquetées selon un code déterminé lui aussi : chaque étiquette comporte les initiale d’un médecin biologiste du service ainsi qu’un statut du dossier : documents manquants, complets, en attente.
« Je suis Madame Formulaire », conclut Manon, particulièrement fière de ce système qu’elle a pu organiser elle-même il y a déjà quelques années. Étant la seule secrétaire pour le secteur médico-légal du service, elle est aussi la seule personne du service ayant voulu (re)prendre en charge l’organisation des dossiers.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Fanny Maurel (1 avril 2025). « Je suis Madame Formulaire ». Enquêtes graphiques. Consulté le 23 avril 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13lyh